Bernard
Hislaire
/Yslaire

[contacté par Wouter Porteman]
Albums de Bernard Hislaire/Yslaire (1957, Belgique) :
Bidouille et Violette (4 albums, Dupuis + intégrale, Glénat) Le Ciel au dessus des Bruxelles (Futuropolis) Coursensac et Baladin (scénario de Jean-Marie Brouyère, Point Image) Le Gang Mazda (scénario pour Christian Darasse, tome 1 et 2, Dupuis) Mémoires du XXème Ciel (Introduction au XXème Ciel, Delcourt + 4 albums, Delcourt (tome 1)/Humanoïdes Associés (tome 1 à 4)) Sambre (scénario de Balac (tome 1 + partiellement tome 2), 5 albums, collection Prestige (tome 1 à 4), collection Caractère (tome 1 à 5) + 2 intégrales + La Légende des Sambres, textes de Eric Verhoest/Jean-Luc Cambier, Glénat).

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Qu'est-ce qui rend Franquin si extraordinaire ?
Son génie graphique, sa virtuosité, sa gentillesse, sa remise en question permanente. Ce fut le premier véritable artiste en BD, dont l'œuvre est le reflet de ses états d'âme, le journal intime de ses obsessions, de ses phantasmes. Le plus triste est qu'il était le seul à douter de sa valeur. Je me rappelle d'un jour ou Numa Sadoul tentait de le rassurer en lui rappelant qu'il avait des millions de lecteurs qui le vénéraient. Il a répondu qu'il pouvait y avoir des millions de cons et que d'ailleurs des millions de gens avaient élu Hitler au pouvoir. Aujourd'hui, j'ai envie de lui répondre "Cher André, tu a raison, mais toi au moins, tu les a fait rire..."
Comment avez-vous fait connaissance avec Franquin ou ses albums ? Quels sont votre premiers souvenirs de lui ? Avez-vous eu des contacts personnels ?
J'ai rencontré Franquin à l'âge de 13 ans, il m'a donné ses premiers conseils de professionnel et n'a cessé de me suivre. Aujourd'hui encore, j'entends certaines de ses phrases. Il a su distinguer dans mes premières BD ce qui était en germe et m'a encouragé à le développer. Il avait un œil extraordinaire, intransigeant. C'était un maître, le seul génie graphique que la BD a compté avec Mœbius. Les autres (n')ont (que) énormément de talent.
Quel(le) est votre album, aventure, gag ou personnage préférée de Franquin et pourquoi ?
Un gag. Celui ou Gaston dans sa voiture se fait dépasser par une autre voiture beaucoup plus rapide. A la quatrième case on découvre que Prunelle peut d'ailleurs en ouvrant la portière cueillir des pâquerettes, ce qui donne toute la relativité de la vitesse à laquelle roule la voiture de Gaston. Un gag révolutionnaire sur l'illusion du mouvement en BD, sur la manipulation du lecteur, sur la relativité. Un humour subtil aux frontières de la métaphysique, de la poésie... L'exemple même de la spécificité du langage BD, intraduisible dans un autre média.
Franquin a-t-il influencé quelque part votre style, votre manière de travailler ?
Il a été un guide, pendant toute une époque, un peu comme un père... que j'ai tué un jour (graphiquement) sur l'autel du réalisme. Pour pouvoir mieux s'en souvenir... Comme tous les pères.
Quel est selon vous l'impact de Franquin au monde de BD présent ?
Je ne connais pas un dessinateur humoristique qui ne puisse prétendre ne pas avoir été influencé par lui. Il y a avant et après Franquin. Il n'y en a pas deux comme lui.